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7 juin 2015 7 07 /06 /juin /2015 14:41
La religion de Paul de Lagarde

À l’instar d’un Léon Bloy, Paul de Lagarde s’était attiré à la fin de sa vie toutes les inimitiés possibles et imaginables, si bien qu’il mourut en ayant perdu l’essentiel de ses amis les plus charitables. Il était dans une telle détestation de la vie universitaire et de l’académisme allemands que ce mauvais ressentiment se manifestait chez lui par la conviction intime d’une conspiration à son égard. En quelque sorte, Lagarde projetait son propre penchant pour la calomnie et pour l’intrigue ; selon lui, la plupart de ses collègues l’enviaient et le plagiaient.

Tout cela n’empêcha aucunement la réputation de son œuvre de se propager au sein des élites intellectuelles dès son décès ; on fit de Lagarde un prophète, et de fait, il devint, à titre posthume, l’un des plus marquants théoriciens de l’idéologie völkish.  

 

Grossdeutschland

Grossdeutschland

Le moins que l’on puisse dire c’est que Paul de Lagarde fut un théologien très particulier. Considérant Luther comme un homme sans aucune importance, profondément irrité par le protestantisme ainsi que par la religion catholique – ne parlons pas de la religion juive pour laquelle il avait une aversion totale – Lagarde a échafaudé dans ses essais des années 1870 une sorte de nouvelle religion, basée sur la foi en la Grande Nation allemande, ce qu’il appellera Grossdeutschland, comprenons toute la Mitteleuropa. Pour lui, chaque pays aurait une tâche qui lui serait assignée par Dieu et lui seul aurait perçu et compris quels devraient être les devoirs nationaux qui incombent au peuple allemand. Bon nombre de chrétiens allemands, dans leur quête d’une croyance qui germaniserait le christianisme en le dépouillant de ses éléments juifs et universels, ont trouvé dans ce christianisme déformé un réconfort providentiel. En 1930, dans son essai Der Mythus des zwanzigsten Jahrhunderts, Alfred Rosenberg, le fameux ministre d’Hitler et théoricien du nazisme, dira de cette déconstruction du christianisme que le national-socialisme n’est rien d’autre que l’incarnation du rêve germanique de Lagarde.

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